Agacée par son nom, une artiste veut rebaptiser l'Agassizhorn

Une artiste helvético- haïtienne va rebaptiser symboliquement un sommet des Alpes bernoises.

NILS COUTURIER | 14 AOÛT 2008 |

Les autorités communales de Grindelwald, Guttannen et Fieschertal désapprouvent l'action de Sasha Huber. Mais l'artiste helvético-haïtienne est bien résolue à changer symboliquement le nom de l'Agassiz-horn. Le 23 août, elle ira déposer en hélicoptère une plaque commémorative sur le sommet. Qu'a fait cette montagne pour mériter un sort pareil? Rien, à part qu'il porte bien haut à 3946 mètres pour être précis depuis le début du XXe siècle le nom d'un scientifique suisse controversé. Célèbre pour ses études sur les glaciers, Louis Agassiz est aussi connu pour avoir été un «remarquable raciste et un précurseur idéologique de l'Apartheid», selon les termes du socialiste genevois Carlo Sommaruga.

La face controversée de Louis Agassiz concerne ses théories sur le classement du genre humain: il s'est notamment servi de la photographie d'un esclave de Caroline du Sud pour prouver l'infériorité de la race noire. Ce n'est donc pas par hasard si Sasha Huber s'apprête à poser une plaque représentant Renty, cet esclave d'origine congolaise. Par cette performance artistique, elle espère faire un premier pas pour rebaptiser le pic «Rentyhorn».

Abonné aux controverses

Louis Agassiz et sa montagne n'en sont pas à leur première controverse. En mai 2007, à l'occasion du 200e anniversaire de sa naissance, le géologue suisse avait vu sa position vaciller en haut des Alpes tandis qu'un comité se créait sous le slogan «Démonter Louis Agassiz!». Les membres de ce groupe, réunis autour de l'historien saint-gallois Hans Fässler, s'étaient lancés dans une croisade contre l'Agassizhorn. Le projet avait néanmoins échoué devant le Conseil fédéral et le sommet avait gardé son nom.

Membre du comité, Sasha Huber paiera donc de sa personne pour changer le patronyme de la montagne. Quant aux autres lieux suisses qui
portent le nom du scientifique, ils ne devraient pas faire l'objet d'un mouvement aussi important. «L'action du comité est prioritairement dirigée sur l'Agassizhorn, mais j'ai distribué des tracts dans la rue Agassiz à Lausanne», ajoute Hans Fässler. Ce dernier ne craint pas pour la mémoire
historique du géologue suisse: «Même si on rebaptise l'Agassiz-horn, il restera encore une vingtaine d'endroits dans le monde qui portent le nom de Louis Agassiz, même sur la lune et sur Mars!»